Retour sur Suspiria

mardi 11 août 2009

Amis parisiens bloqués dans la capitale, je vous propose de sauver votre mois d'août en courant à la séance de cinéma la plus réjouissante depuis des lustres : la projection de Suspiria au Max Linder Panorama le samedi 15 août à minuit. Compte tenu de la beauté inouïe de ce film et de sa rareté sur grand écran, cette reprise est un vrai événement, inratable pour tous les forçats de l'été amateurs de sensations fortes.

J'y serai pour ma part, au premier rang pour être complètement absorbé, avec mon T-Shirt mal coupé des Goblin, ma coupe de cheveux au bol à la Dario Argento et mes yeux aussi écarquillés que ceux de Jessica Harper !

Quand je relis l'article que j'ai écrit en janvier à propos de Suspiria, je le trouve très naïf et un peu à côté de la plaque. Il y a 8 mois, je n'étais encore qu'un jeune padawan bien novice en cinéma bis. Je dis même de grosses bêtises dans cet article : Suspiria n'est pas franchement un slasher et encore moins un giallo. Nous sommes plus dans un univers qu'on peut qualifier d'horreur fantastique. Dès le premier meurtre, les bras poilus du tueur nous montrent clairement que ce film se situe en marge de la réalité, dans un monde onirique très personnel et à l'esthétique très marquée.

J'ai du voir Suspiria cinq ou six fois depuis janvier (et je crois avoir scotché plus de 50 fois sur la maîtrise ébouriffante des 15 premières minutes) et je suis tout d'abord frappé de voir à quelle point l'histoire importe peu dans ce film - et pourtant Dieu sait à quel point j'aime qu'on me raconte des histoires au cinéma. A l'extrême opposé d'Eric Rohmer par exemple, Dario Argento n'est pas un cinéaste qui s'adresse à notre intelligence ou même à notre culture. Il touche en nous des cordes beaucoup plus basiques : nos sens bien sûr (son et image sont époustouflants) mais également nos sensations primales (peur, dégoût, angoisse). Suspiria est pour moi un film éminemment physique et qui pénètre le spectateur comme les coups de couteau au coeur reçues par l'infortunée première victime. Tout cela est très charnel.






Enfin, dans les suppléments du coffret Suspiria édité par Wild Side et que je ne saurais que trop vous recommander, j'ai trouvé mille informations passionnantes sur la genèse de ce chef d'oeuvre. On y apprend notamment que les fameuses tonalités rouges n'étaient pas crées par des gélatines classiques mais par des spots blancs ultra-puissants sur lesquels des tentures de velours rouge étaient disposées ! Ce procédé explique la chaleur si particulière de ces couleurs. On découvre également que les murs rouges des couloirs de l'école de danse sont en fait des panneaux translucides sur lesquels les motifs et la couleur étaient projetés.

Dans le même genre, Dario Argento raconte qu'au départ son film devait mettre en scène de toutes jeunes filles. Il a du s'incliner devant le refus des producteurs de voir des filles de 12 ans se faire massacrer à l'arme blanche mais il a conservé malgré tout les dialogues (qui sont en décalage complet avec l'âge des jeunes filles que nous voyons à l'écran) et il a demandé à ce que toutes les poignées de portes soient rehaussées afin d'accentuer le côté "petite fille" des pensionnaires.

Murs rétro-éclairés et poignées rehaussées font partie de ces détails qu'on ne remarque pas mais qui contribuent à renforcer l'étrangeté de tous ces plans

Dans un autre registre, j'ai découvert, par les multiples interviews de lui-même ou de ses collaborateurs, un certain nombre d'aspects de la personnalité de Dario Argento. Contrairement à son père spirituel Mario Bava et aux autres spécialistes italiens du giallo, qui étaient tous des personnalités de droite, Argento était un militant d'extrême-gauche convaincu, fortement politisé, même si cela n'apparaît pas du tout dans ses films (selon moi). Au-delà de sa couleur politique, Dario Argento apparaît comme un homme affable, d'une grande gentillesse et d'une modestie rare. Un de ses collaborateurs raconte qu'il était terrorisé par les films d'angoisse/horreur de ses confrères et qu'il a entrepris de faire des films terrifiants dans une volonté d'exorciser cette peur panique.

A la réflexion, Dario Argento est tout simplement un geek, le genre de personne introvertie dont les "mecs cools" se moquaient au collège et qui s'est vengé d'eux plus tard en les terrifiant dans les salles obscures. Cela explique sans doute pourquoi ses films sont si populaires dans la communauté des ciné-geek 2.0 - communauté dont j'ai bien peur de faire partie par un certain nombre de côtés.

Bon, et dernière chose, on trouve dans ce coffret la BO complète du film. Étonnamment, je trouve que cette musique de Goblin n'est pas très enthousiasmante dès qu'elle sort du cadre de Suspiria. En fait, quand je l'entends, j'ai avant tout envie de regarder le film - même si le film serait vraiment boiteux si cette musique était absente. Je vous propose tout de même le titre-phare.








Goblin - Suspiria

Bref, rendez-vous samedi au Max Linder !

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11 commentaires:

Benoit a dit…

Je ne serai pas au Max Linder Samedi mais j'y serais allé si j'avais été là. Film magnifique découvert grâce à Marivaudage.
Encore....

Marivaudage a dit…

cheers dude !

FredMJG a dit…

Dario Argento est un type tellement affable que les mains poilues qui tiennent en général le couteau dans ses films sont les siennes...
:oD

astrologie a dit…

merci de nous faire partager ce blog.

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contente d'être citée dans cette page.

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