Nathan Juran, 1958
Film fantastique américain des années 50 toujours. Je me souviens d'une époque où ce film était multi-diffusé à la TV hertzienne aux périodes de Noël (est-ce encore le cas ?). Je l'avais donc déjà vu étant petit et j'avais peur que le souvenir que j'en gardais, aussi parcellaire qu'excellent, ne s'effondre suite à un nouveau visionnage 'adulte'.
Eh bien pas du tout : 20 ans après, j'ai de nouveau été ébloui par l'inventivité visuelle époustouflante de ce petit chef-d'œuvre d'aventure.
Pitch : dans un Bagdad fantasmé et chamarré, le valeureux capitaine Sinbad file le parfait amour avec la princesse Parisa. Un mariage est prévu pour bientôt. C'était sans compter sur la perfidie du magicien Sokurah qui jette un sort maléfique sur la princesse Parisa : celle-ci rétrécit subitement (encore !) et ne mesure plus que quelques centimètres. Démasqué, le magicien avoue que le seul remède pour sauver la princesse est une potion à base de coquille d'aigle à deux têtes, espèce qu'on ne trouve que sur l'île de Colossus. Sinbad embarque donc un équipage de renégats (car nul ne veut se rendre sur cette île maudite) dans une quête qui s'annonce pour le moins périlleuse : cette île est en effet peuplée de monstres étranges et fort dangereux.
Le pitch n'est en fin de compte pas très éloigné de celui de King Kong : une bande d'hommes en armes arrive sur une île mystérieuse pour sauver une jeune femme et doit affronter toute une série de monstres inquiétants. Mais son traitement est très différent. Autant King Kong, bien que teinté d'une poésie érotique remarquable, reste un film très sérieux qui cherche à créer de la terreur chez le spectateur, autant Le 7e Voyage de Sinbad nous emmène sur le terrain de la féérie, du fantastique et de l'exotisme : costumes extravagants, couleurs saturées, décors grandioses et magie omniprésente (on retrouve même la lampe d'Aladin qui fait apparaître un génie lorsqu'on la frotte en prononçant la bonne formule magique). Mais tout cet environnement n'est pas rigide et codifié (et donc ennuyeux) comme dans l'heroic fantasy habituelle : ici, tout est possible, on ne sait jamais à quoi s'attendre et le film nous emmène de surprise en émerveillement.
Princesse de poche
En fait oui, Le 7e voyage de Sinbad me paraît très réussi car il reste un film léger. A l'image de la princesse. Bien que devenue liliputienne, celle-ci reste tout sourire, pleine d'amour pour son Sinbad, drôle, vive, esquissant ici ou là un petit pas de danse, et arrivant même à se rendre utile en réveillant le génie de la lampe ou en libérant des prisonniers. Par son côté éminemment adorable, elle me rappelle Kylie Minogue en fée verte dans Moulin Rouge ou Laureline dans cette épisode de la BD Valérian (je ne sais plus lequel) où elle est rétrécie et passe tout son temps à pester, perchée sur l'épaule de son bien-aimé.
Sinbad éberlué après la transformation de Parisa
Une autre image pleine de charme et de féérie
La princesse à l'intérieur de la lampe magique
... ou en train de suivre Sinbad sur une boule de cristal
Un sympathique bestiaire
Il faut de plus souligner l'inventivité du réalisateur quant aux monstres étonnants qu'il nous présente. Inspirées de mythologies diverses (grecques, orientales, moyenâgeuses), ces effrayantes bestioles de pâte à modeler sont toutes très belles à voir et surtout très vivantes.
Ne pas s'attaquer aux poussins à deux têtes ...
... sous peine de voir arriver la mère à deux têtes
L'inoubliable combat contre le squelette
Pour le coup, cette scène rappelle franchement King Kong
Bizarrement, je m'attache beaucoup plus à ces créatures irréelles et imparfaites qu'aux monstres numériques qu'on peut voir dans la gonflante trilogie des Lord of the Rings (par exemple). Je répète des choses déjà dites sur ce blog mais encore une fois, Le 7e voyage de Sinbad nous montre que l'irréalisme des personnages n'empêche en rien l'émotion qu'ils peuvent nous transmettre. Pour prendre d'autres exemples plus récents, n'importe quelle poule de Chicken Run, en pâte à modeler bien apparente, me touche mille fois plus que ce crétin de Jar Jar Binks, pourtant parfaitement numérisé (avec les bons reflets et tout ... trop bien) dans les derniers Star Wars (beurk, beurk et re-beurk).
Ici, bien au contraire, l'introduction d'éléments fantastiques, qui déréalise rapidement l'histoire, nous fait rentrer dans le domaine de la féérie poétique, dans une forme d'illusion enchanteresse - et c'est ça qui fait pour moi la magie du cinéma, plus que des prouesses techniques d'informaticiens.
La princesse redevenue normale, il se marièrent, vécurent heureux et firent plein de petits califes.
Bref, Le 7e voyage de Sinbad est un excellent film pour les petits comme pour les grands, une aventure riche en rebondissements, à prendre au premier degré (comme toujours), se déroulant dans un monde merveilleux qui résiste étonnamment bien à l'épreuve du temps.
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